Libye-France: L'imbroglio français
Crise libyenne - La cacophonie qui s'installe au sein du trio Nicolas Sarkozy- Alain Juppé-Bernard Henry Levy laisse perplexe bon nombre d'observateurs quant à la gestion du conflit libyen. Des propos contradictoires distillés ici et là révèlent l'impuissance de la France à terminer cette guerre qui est tout sauf humanitaire. A l'instar de la très longue guerre d'Afghanistan, celle menée depuis plus de quatre mois en Libye prouve, une fois encore, que la puissance militaire n'est en rien la panacée. Et pourtant, les Américains ont fait étalage de leur haute technologie avec des avions d'espionnage électronique, des bombardiers (pendant une courte période), des avions ravitailleurs et des drones.
Quant aux aviateurs français et britanniques (80% des raids offensifs et des vols de reconnaissance) associés à leurs collègues belges, italiens et norvégiens, ils n'ont ménagé ni leur peine ni leurs missiles, sans pouvoir encore crier victoire.
Une remarque, en passant, le spectacle n'a pas mobilisé beaucoup d'acteurs. Seuls cinq Etats de l'Otan, sur les 28 membres de l'Alliance, se sont engagés dans la chasse au Kadhafi.
Et, parmi les 27 pays de l'Union européenne, les vrais guerriers se comptent sur les doigts d'une main. Ce qui autorise un diplomate français, agressif en diable, à qualifier de «bordel sans nom » l'ambiance qui règne à l'Otan et à Bruxelles.
TOURISME D'EMISSAIRES
Aujourd'hui, à entendre Nicolas Sarkozy, il est vraiment temps d'en finir avec cet ennemi dont les exploits, terroristes ou autres, avaient bénéficié voilà quelques années d'un pardon collectif. Américains, Français, Britanniques, Italiens et Allemands, notamment, renouaient aussitôt des relations politiques avec le riche Kadhafi et se disputaient dans la foulée ses faveurs commerciales et pétrolières.
Moralité, s'il n'y en a jamais eu dans l'art de la guerre, il faut trouver une porte de sortie, puisque bombes et missiles n'ont pas permis de contraindre le Guide libyen à jeter l'éponge.
Selon « Figaro» du 26 juin, Nicolas Sarkozy avait déjà accepté de recevoir longuement, deux semaines plus tôt, le colonel Saleh Bashir, «un très proche de Kadhafi», sans obtenir la moindre concession de son patron.
Lequel, histoire de jouer la montre, dépêchait alors d'autres émissaires en Europe et au Maghreb, chargés, selon les termes ironiques d'un diplomate français, de «le dire prêt à négocier gentiment et à autoriser des élections libres».
Puis, tandis que les raids se poursuivent, Gérard Longuet, le ministre de la Défense, rencontre des journalistes le 10 juillet, deux jours avant le débat à l'Assemblée sur cette guerre sans conclusion. Et, il leur délivre cette promesse, destinée en fait aux députés : « On arrête de bombarder dès que les Libyens parlent entre eux ».
Et d'ajouter, à la surprise générale, que Kadhafi pourra rester à Tripoli : «Il sera dans une autre pièce de son palais, avec un autre titre». Une déclaration plutôt abrupte, qu'un conseiller de L'Elysée prétend corriger un peu, le 12 juillet, mais sans démentir Longuet : « Pour un arrêt des hostilités, il faut le retrait du pouvoir de Kadhafi ». En voilà une nouvelle
Et la fête continue. Une semaine plus tard, Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères, devant des caméras de LCI, en rajoute, alors que Nicolas Sarkozy est toujours muet : «L'une des hypothèses envisagées, c'est qu'il (Kadhafi) séjourne en Libye à une condition : qu'il se mette à l'écart de la vie politique».
Il ne lui reste qu'à convaincre le gouvernement britannique d'accepter cette fin de guerre «à la française » (formule d'un de ses collaborateurs). Ce que Alain Juppé tentera de faire, le 25 juillet, en se rendant à Londres.
Mais, depuis la mi-juillet, le philosophe Bernard-Henri Levy, le missi dominici de Nicolas Sarkozy, arpente la Libye insurgée et prépare sa rentrée parisienne. Le 17 juillet, à Goualich, très au sud de Tripoli, il se fait photographier la main posée sur l'épaule d'un combattant, et l'AFP filme ses commentaires.
RAID SUR L'ELYSEE
Le 20 juillet, BHL, débarque dans un salon de l'Elysée, entouré de chefs rebelles venus de Misrata, pour demander de nouvelles livraisons d'armes à Nicolas Sarkozy. Lequel l'invite à participer à l'entretien au côté du général Puga, son chef d'état-major particulier.
A la sortie du Château, des caméras filment les propos de BHL sur le trottoir élyséen. Mais c'est le lendemain que le philosophe va sortir ses griffes. Interrogé sur Radio France Internationale, il s'en prend vertement à Alain Juppé, qui vient d'admettre que Kadhafi pourrait continuer de vivre en Libye.
«Cette déclaration me semble étrange, dit-il. Elle me semble même contradictoires avec tout ce que lui-même (Alain Juppé) et les responsables français, à commencer par le président, disent depuis presque cinq mois.
C'est peut-être un lapsus, peut-être une maladresse ». Et, gentiment, il concède : « Tout le monde en fait » Avant d'enfoncer le clou : « C'est le contraire de la position française, quelque chose d'inacceptable pour le peuple libyen dans son ensemble (sic)».
De retour d'un voyage à Madrid, Alain Juppé se dit furieux, mais «préfère traiter par le mépris cette nouvelle mauvaise manière de Sarko et de son BHL», confie l'un de ses collaborateurs.
Pierre Sellal, secrétaire général du Quai d'Orsay, téléphone à ses homologues de l'Elysée pour «protester». Et Henri Ladsous, chef de cabinet d'Alain Juppé, demande des explications sur la visite des libyens.
Enfin, d'autres diplomates estiment que leur ministre ne devrait pas admettre qu'une vedette des médias « parle au nom de la France ». Et de l'Elysée ? Ce qui, semble-t-il, ne dérange pas trop Nicolas Sarkozy, qui, selon l'un de ses proches, « estime qu'il ne faudrait pas que Juppé se croie trop important. »
Le Conseil national de transition (CNT) libyen qui vient de nommer son représentant en France, Mansour Saif Al-Nasr (le ministère des affaires étrangères s'est refusé à tout commentaire sur cette prise de fonctions), devra manier avec circonspection les circonlocutions politico-diplomatiques françaises.
Quant aux aviateurs français et britanniques (80% des raids offensifs et des vols de reconnaissance) associés à leurs collègues belges, italiens et norvégiens, ils n'ont ménagé ni leur peine ni leurs missiles, sans pouvoir encore crier victoire.
Une remarque, en passant, le spectacle n'a pas mobilisé beaucoup d'acteurs. Seuls cinq Etats de l'Otan, sur les 28 membres de l'Alliance, se sont engagés dans la chasse au Kadhafi.
Et, parmi les 27 pays de l'Union européenne, les vrais guerriers se comptent sur les doigts d'une main. Ce qui autorise un diplomate français, agressif en diable, à qualifier de «bordel sans nom » l'ambiance qui règne à l'Otan et à Bruxelles.
TOURISME D'EMISSAIRES
Aujourd'hui, à entendre Nicolas Sarkozy, il est vraiment temps d'en finir avec cet ennemi dont les exploits, terroristes ou autres, avaient bénéficié voilà quelques années d'un pardon collectif. Américains, Français, Britanniques, Italiens et Allemands, notamment, renouaient aussitôt des relations politiques avec le riche Kadhafi et se disputaient dans la foulée ses faveurs commerciales et pétrolières.
Moralité, s'il n'y en a jamais eu dans l'art de la guerre, il faut trouver une porte de sortie, puisque bombes et missiles n'ont pas permis de contraindre le Guide libyen à jeter l'éponge.
Selon « Figaro» du 26 juin, Nicolas Sarkozy avait déjà accepté de recevoir longuement, deux semaines plus tôt, le colonel Saleh Bashir, «un très proche de Kadhafi», sans obtenir la moindre concession de son patron.
Lequel, histoire de jouer la montre, dépêchait alors d'autres émissaires en Europe et au Maghreb, chargés, selon les termes ironiques d'un diplomate français, de «le dire prêt à négocier gentiment et à autoriser des élections libres».
Puis, tandis que les raids se poursuivent, Gérard Longuet, le ministre de la Défense, rencontre des journalistes le 10 juillet, deux jours avant le débat à l'Assemblée sur cette guerre sans conclusion. Et, il leur délivre cette promesse, destinée en fait aux députés : « On arrête de bombarder dès que les Libyens parlent entre eux ».
Et d'ajouter, à la surprise générale, que Kadhafi pourra rester à Tripoli : «Il sera dans une autre pièce de son palais, avec un autre titre». Une déclaration plutôt abrupte, qu'un conseiller de L'Elysée prétend corriger un peu, le 12 juillet, mais sans démentir Longuet : « Pour un arrêt des hostilités, il faut le retrait du pouvoir de Kadhafi ». En voilà une nouvelle
Et la fête continue. Une semaine plus tard, Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères, devant des caméras de LCI, en rajoute, alors que Nicolas Sarkozy est toujours muet : «L'une des hypothèses envisagées, c'est qu'il (Kadhafi) séjourne en Libye à une condition : qu'il se mette à l'écart de la vie politique».
Il ne lui reste qu'à convaincre le gouvernement britannique d'accepter cette fin de guerre «à la française » (formule d'un de ses collaborateurs). Ce que Alain Juppé tentera de faire, le 25 juillet, en se rendant à Londres.
Mais, depuis la mi-juillet, le philosophe Bernard-Henri Levy, le missi dominici de Nicolas Sarkozy, arpente la Libye insurgée et prépare sa rentrée parisienne. Le 17 juillet, à Goualich, très au sud de Tripoli, il se fait photographier la main posée sur l'épaule d'un combattant, et l'AFP filme ses commentaires.
RAID SUR L'ELYSEE
Le 20 juillet, BHL, débarque dans un salon de l'Elysée, entouré de chefs rebelles venus de Misrata, pour demander de nouvelles livraisons d'armes à Nicolas Sarkozy. Lequel l'invite à participer à l'entretien au côté du général Puga, son chef d'état-major particulier.
A la sortie du Château, des caméras filment les propos de BHL sur le trottoir élyséen. Mais c'est le lendemain que le philosophe va sortir ses griffes. Interrogé sur Radio France Internationale, il s'en prend vertement à Alain Juppé, qui vient d'admettre que Kadhafi pourrait continuer de vivre en Libye.
«Cette déclaration me semble étrange, dit-il. Elle me semble même contradictoires avec tout ce que lui-même (Alain Juppé) et les responsables français, à commencer par le président, disent depuis presque cinq mois.
C'est peut-être un lapsus, peut-être une maladresse ». Et, gentiment, il concède : « Tout le monde en fait » Avant d'enfoncer le clou : « C'est le contraire de la position française, quelque chose d'inacceptable pour le peuple libyen dans son ensemble (sic)».
De retour d'un voyage à Madrid, Alain Juppé se dit furieux, mais «préfère traiter par le mépris cette nouvelle mauvaise manière de Sarko et de son BHL», confie l'un de ses collaborateurs.
Pierre Sellal, secrétaire général du Quai d'Orsay, téléphone à ses homologues de l'Elysée pour «protester». Et Henri Ladsous, chef de cabinet d'Alain Juppé, demande des explications sur la visite des libyens.
Enfin, d'autres diplomates estiment que leur ministre ne devrait pas admettre qu'une vedette des médias « parle au nom de la France ». Et de l'Elysée ? Ce qui, semble-t-il, ne dérange pas trop Nicolas Sarkozy, qui, selon l'un de ses proches, « estime qu'il ne faudrait pas que Juppé se croie trop important. »
Le Conseil national de transition (CNT) libyen qui vient de nommer son représentant en France, Mansour Saif Al-Nasr (le ministère des affaires étrangères s'est refusé à tout commentaire sur cette prise de fonctions), devra manier avec circonspection les circonlocutions politico-diplomatiques françaises.
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