Quelle mouche a pu piquer A.D., petit fils – mineur – du magnat de la pub Jean-Claude Decaux, l’une des plus grosses fortunes de France ? Pour l’heure, on l’ignore et la seule certitude, c’est que le chérubin a été placé en garde à vue pour avoir braqué d’autres jeunes de son âge avec lesquels il entendait régler une embrouille, selon un scénario qui hésite entre Gran Torino, le dernier succès de Clint Eastwood, et les cascades ratées de Mister Bean.
Telle que reconstituée par la police, l’action trouve sa source en début de semaine à la sortie du très chic lycée Jean-Baptiste SAY sis rue Auteuil.
Pour une raison non encore éclaircie, notre petit fils de pub, qui n’est pas scolarisé dans cet établissement, a un différent avec des jeunes du lycée et brise une bouteille sur le crâne de l’un d’entre eux. Pas trop de casse, mais une action qui met en effervescence les camarades de l’agressé. Ces derniers cherchent, semble-t-il, à mettre la main sur l’agresseur. Une information qui n’échappe pas à ce dernier, comme l’information du lieu où les lycéens se retrouvent, c’est-à-dire soit devant le lycée, soit au café de La Gare près de la porte de la Muette.
Ainsi tuyauté, A.D. entreprend de régler ses comptes comme au cinéma. Problèmes : mineur, il n’a pas le permis de conduire et, pied tendre, il n’a pas non plus de complice pour lui donner un coup de main. En revanche, il a de l’argent de poche. Il décide donc de louer une Porsche Carrera avec chauffeur plutôt que d’enfourcher un vélib’. Renseignements, c’est d’un usage courant au sein de la jeunesse des beaux quartiers. Veut-on aller en boite avec une belle voiture pour épater les filles quand bien même on ne possède pas le permis ? Simple comme un coup de fil, on loue.
Simple comme un vélib’
C’est ainsi qu’il débarque – splendide – au café de La Gare. Le chauffeur n’est au courant de rien. Il a juste pour consigne d’attendre son jeune maître. Qui ne saurait tarder…
A.D. fait donc irruption dans le bistrot et se dirige vers ses adversaires. Très théâtral, il lance : « Alors, il paraît que vous me cherchez ?! Manifestement, vous ne savez pas à qui vous avez à faire. Je vais vous apprendre la vie ». Une somptueuse paire de lunettes lui mange la moitié du visage.
Convenons-en, normalement, dans un film, ses interlocuteurs auraient dû s’égailler telle une volée de moineaux. Mais au « Café de la gare », Paris 75016, ça coince.
Ses interlocuteurs le raillent et lui demandent d’enlever ses lunettes, le testent, et subitement, l’un d’entre eux fait valser ses lunettes. C’est alors qu’A.D. sort de sa poche un pistolet Berretta 9 mm. Un calibre un vrai, avec lequel il braque ses adversaires du jour. Confusion, mais le jeune héritier ne contrôle plus, ni son scénario, ni son arme poing qu’il se fait subtiliser…
De justesse, A.D. parvient à s’enfuir à bord de sa Porsche Carrera. Les jeunes, eux, appellent la police. Un avis de recherche est lancé, et notre Clint Eastwood en culotte courte est interpellé dès samedi.
Ce qui s’appelle être rattrapé par la réalité, et c’est moins drôle.