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Algerie : Les Français ont obtenu tout ce qu'ils ont voulu sans contrepartie.

Je rentre d’Alger en ayant le sentiment du travail accompli », a écrit ce mercredi matin sur son blog Jean‑Pierre Raffarin, en charge du dossier de coopération entre son pays et l’Algérie. A Alger, l’ancien Premier ministre français a co‑présidé avec Pierre Lellouche, secrétaire d’État au Commerce extérieur, et Mohamed Benmeradi, ministre de l’Industrie, le Premier forum de partenariat algéro‑français. Plus de 640 PME algériennes et françaises ont assisté à ce forum.
« Un climat d’apaisement et de pragmatisme »s’est ainsi affirmé. Ceci ouvre peut-être une nouvelle étape des relations économiques entre la France et l’Algérie. Signe de ce ton nouveau, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, s’est rendu, à mon invitation, à "la Résidence des oliviers", la résidence de France, pour un déjeuner de travail, accompagné de 5 de ses ministres. Une première depuis 1962 », a encore écrit Jean-Pierre Raffarin.

Quelle signification donner à ce déplacement d’Ahmed Ouyahia à la résidence de l’ambassadeur de France à Alger ? Fera‑t‑il de même pour les résidences des autres ambassades ou la France est‑elle une exception ? Le Premier ministre, qui semble nourrir des ambitions présidentielles, est l’interlocuteur privilégié des officiels français ces deux dernières années. Tous les ministres français qui se sont rendus à Alger sont passés par son bureau après avoir été reçus par le président Abdelaziz Bouteflika.

Au Forum d’Alger, Pierre Lellouche a déclaré que « ceux qui regardent dans le rétroviseur se trompent de direction ». Une déclaration qui signifie l’enterrement des demandes algériennes relatives aux excuses de la France sur les crimes coloniaux. La sortie algéroise de Lellouche n’a été contrée par aucun responsable algérien. Il y a quelques mois, Ahmed Ouyahia avait qualifié de « surenchère politicienne » l’idée d’un projet de loi de criminalisation du fait colonial initié par des députés du FLN.

Lellouche et Raffarin donnaient l’impression d’évoluer en terrain conquis au Forum d’Alger. « Sur plusieurs dossiers, j’ai été le témoin de la bonne volonté des Algériens, il reste cependant beaucoup à faire de part et d’autre pour rendre notre coopération plus fluide. La confiance dans cette dynamique nouvelle exprimée par les patrons de PME est aussi un facteur encourageant », écrit encore Jean‑Pierre Raffarin. Les deux responsables français n’ont même pas jugé utile d’accorder des entretiens à la presse algérienne pour expliquer leur démarche.

Tout compte fait, les français ont eu l’essentiel : reprise à 100 % de l’entreprise Alver, leader national dans l’industrie du verre – malgré la loi 51/49 –, installation de l’assureur Axa en Algérie, lancement d’une usine de tramway par Alstom à Annaba (un projet de 25 millions d’euros), reconduction du contrat de gestion des eaux d’Alger par Suez avec perspective de déploiement dans d’autres villes et, surtout, possibilité aux entreprises France Télécom, Alcatel‑Lucent et La Poste de profiter de plusieurs marchés dans les services postaux et la 4 G pour les TIC. « Ces entreprises françaises sont porteuses de projets. Elles viennent avec des idées à partager et des ambitions à conjuguer », a déclaré Raffarin à propos des contrats à venir dans les TIC. S’ajoutent à cela la gestion future du métro d’Alger par la RATP et l’éventualité de construction d’une usine de véhicules par Renault.

Ne craignant pas de manipuler les chiffres, Jean‑Marc Jahn, directeur général de la SEAAL (Société des eaux et de l’assainissement d’Alger), partenaire du groupe français Suez‑Environnement, a déclaré, en marge du forum d’Alger, que son entreprise a permis de porter le taux d’alimentation des algérois en eau potable « de 8 % à presque 100 % ». Autrement dit, avant l’arrivée de Suez, les Algérois ne buvaient que de l’eau minérale en bouteilles. Tous les experts mettent en doute ces chiffres avancés visiblement à des fins de marketing (en la matière, Suez est un grand spécialiste). Et du marketing, les Français en ont fait ces derniers jours, mais c’est de bonne guerre.


Aucune demande algérienne n’a été satisfaite

Côté algérien, c’est le silence total ou presque. Mustapha Benbada, ministre du commerce, a été le seul à tempérer un peu les ardeurs de Pierre Lellouche sur les investissements français en Algérie (le ministre français a donné le chiffre de 2,5 milliards en hors hydrocarbures). Benbada a indiqué que les investissements français sont concentrés dans les services et a ajouté que les entreprises françaises continuent à faire plus de commerce que d’investissement. La France est le premier fournisseur de l'Algérie avec 5,2 milliards d’euros. L’Algérie est le premier client de la France en Afrique et dans le monde arabe. Mais « l’Algérie a besoin de partenaire durable pour l’accompagner dans son processus pour la construction d’une économie forte et productive, hors hydrocarbures. Ce partenariat doit passer du cadre commercial à celui d’un véritable transfert de savoir‑faire et de technologies », a déclaré Mustapha Benbada.

Ce lot de contrats accordés aux Français après une longue période de froid politique a‑t‑il une contrepartie ? Le pouvoir algérien cherche‑t‑il à avoir "la paix " en raison des révoltes qui secouent le monde arabe et la chute des dictatures en Tunisie et en Égypte ? Les Français sont‑ils en train de développer les mêmes réflexes que ceux qu’ils avaient du temps de la Tunisie de Ben Ali ? Car si l’Algérie a donné des contrats aux groupes français, aucune concession n’a été faite par les Français.

L'Algérie a formulé des demandes à la France sur l’amélioration de la libre circulation des personnes. Pourquoi aucun chiffre n'a‑t‑il été annoncé sur une amélioration ? En fait, il n’y a eu aucune amélioration. Rien non plus sur les conditions d’accueil de la communauté algérienne en France. Les renouvellements de titres de séjour sont devenus un véritable calvaire : délais trop longs, de multiples documents demandés… Aussi y a‑t‑il lieu de s’interroger : si les Algériens n'ont rien obtenu en échange des contrats donnés aux Français, qui en a profité réellement ?

La visite de Raffarin et de Lellouche à Alger intervient au moment où Claude Guéant, ministre de l'intérieur, multiplie les dérapages sur les musulmans (majoritairement des Algériens) en France. Ses attaques n’ont suscité aucune réaction à Alger. A titre d’exemple, en juillet 2010, le Roi Abdallah d'Arabie Saoudite avait annulé une visite officielle en France à cause de l'affaire de la burqa.   


03/06/2011
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