Pour la Justice, le jeune "tasé" ne menaçait pas la police
Le 21 octobre, à Marseille, un CRS avait fait usage de son Taser contre un jeune sans-papiers présenté comme menaçant.
Le jeune homme sans-papiers interpellé à Marseille la semaine dernière après avoir reçu une décharge de Taser a été relaxé du chef de "violence en réunion sur personne dépositaire de l'autorité publique". L'argument de la "légitime défense" avancé par le CRS qui a fait usage de son pistolet électrique tient-il encore la route après cette décision de Justice?
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L'article du quotidien régional La Provence relatant les faits s'ouvrait prématurément sur cette question: "Le Taser a-t-il sauvé une vie en venant se substituer à une arme de service?", relayant ainsi la position des deux principaux syndicats de police, l'Unsa CRS et Alliance.
Le CRS s'est senti "menacé"
La scène s'est déroulée mardi 21 octobre en fin de journée à Marseille après une course-poursuite sur un chantier entre deux fonctionnaires de la CRS 55 et un groupe de cinq personnes qui tentaient de leur échapper. Ces dernières auraient jeté des pierres et des bouteilles en direction des policiers. C'est alors qu'il était surplombé par quatre des cinq individus que le CRS, se sentant "menacé" selon le parquet de Marseille, a fait usage de son arme.
Dans un premier temps présenté comme mineur dans la presse, le garçon victime de la décharge de 50000 volts serait en fait majeur, tout comme d'ailleurs le deuxième jeune homme arrêté. "Ils ont fait l'objet d'examens radiologiques et osseux confirmant leur majorité", précise le procureur de la République de Marseille, Jacques Dallest. Tous les deux sont sans-papiers.
Dès l'information parue dans la presse, l'Observatoire des violences policières illégitimes de Marseille a fait savoir qu'il resterait "prudent quant à l’interprétation possible de ces faits." De quelle nature était la menace? Y a-t-il eu "légitime défense", comme l'ont fait valoir les syndicats de police?
Relaxé du chef de "violence en réunion sur personne dépositaire de l'autorité publique"
Jeudi dernier, les deux jeunes hommes interpellés ont été jugés en comparution immédiate et s'ils ont été condamnés à deux mois de prison avec sursis et interdiction du territoire national de un an pour infraction à la législation sur le séjour des étrangers, ils ont en revanche été relaxés du chef de "violence en réunion sur personne dépositaire de l'autorité publique".
La Justice a estimé que rien ne permettait de dire, en l'espèce et jusqu'à preuve du contraire, que les deux jeunes sans-papiers avaient représenté une menace pour les CRS en service.
Dans ces conditions, l'argument de la "légitime-défense" avancé par les policiers pour justifier l'usage de l'arme électrique tient-il encore la route? Le coup de Taser se justifiait-il? Oui, a estimé le parquet de Marseille, Jacques Dallest confirmant ce matin avoir fait appel de la décision de relaxe:
"Le tribunal n'a pas la même vision que la nôtre et a estimé que les faits n'étaient pas caractérisés. Pour notre part et compte tenue des circonstances, nous pensons que cela n'invalide pas l'usage du Taser.
"Je ne dis pas qu'il s'agissait d'un guet-apens mais d'un contexte particulier: une fin de journée sur un chantier désert où un CRS s'est retrouvé à un moment face à quatre individus menaçants."
Il a également rappelé que l'usage du Taser était soumis à trois conditions principales: la légitime défense, l'état de nécessité et l'interpellation selon l'article 73 du code de procédure pénale (dans le cadre d'un flagrant délit).
Le RaidH demande une enquête de l'IGPN
Le Réseau d'alerte et d'intervention pour les droits de l'homme (Raidh) -qui a gagné en Justice face à Taser France ce lundi (lire l'encadré)- a réclamé la semaine dernière qu'une enquête soit "diligentée par l'IGPN afin d'éclaircir les conditions d'usage du Taser X26" à Marseille.
Le Raidh s'est également interrogé pour savoir si la vidéo de la caméra qui équipe l'arme avait été rendue publique, rappelant qu'à son sens, "les événements précédents l'usage de l'arme sont ceux qui sont plus pertinents". Un point de vue partagé par le procureur de la République:
"Nous allons visionner les images, mais comme souvent dans ce genre de cas, je ne m'attends pas à voir grand chose, à cause des mouvements et de la brièveté de la scène. Nous n'en saurons probablement pas tellement plus et, de toute manière, l'essentiel s'est joué avant."
Joël Fiorani, du syndicat UNSA CRS, n'a pas souhaité "commenter la décision de Justice" mais a tenu à rappeler que "l'utilisation du Taser permet d'éviter qu'il n'y ai des problèmes plus graves":
"Depuis deux ans que les CRS sont équipés de Taser, c'est la première fois qu'il est utilisé. Une fois en deux ans! Je pense que l'usage est bien encadré".
En attendant l'appel, les deux jeunes ont été remis en liberté et se sont, selon Jacques Dallest, "probablement envolés dans la nature".
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