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Roissy Charles de Gaulle, zone d´arrivée terminal 1, dimanche 2 août 2009, 23h15

Roissy Charles de Gaulle, zone d´arrivée terminal 1, dimanche 2 août 2009, 23h15
Le vol en provenance du Caire, prévu initialement pour 21h, s´est posé avec 1 heure et 14 minutes de retard. Quelques passagers, ceux peu chargés en bagages, commencent à sortir de la porte opaque devant laquelle les
attentes et les espérances s´accumulent. L´un attend son frère, l´autre un ami. Un autre encore était là avant tout le monde. Avant même l´arrivée prévue de l´avion. Un homme d´une trentaine d´années debout juste devant les portes, guettant les ombres derrière les vitres opaques.

A l´étage en dessous, départ pour Israël, dans un ballet de kippas et de képis. Les uns s´en vont, les autres les protègent. Postés un peu à l´écart, les policiers observent de possibles gestes suspects aux alentours. En forçant un peu mon imagination, je me dis qu´un tel attroupement (dans l´esprit des officiers de l´aéroport) ferait une cible de choix si de vilains terroristes voulaient s´attaquer aux représentants bruyants, bedonnants et téléphonants du peuple élu, du peuple victime.

Retour aux arrivées. Derrière les portes, trois petites ombres sautillantes se profilent, suivies d´une grande. Les portes s´ouvrent : trois visages d´enfants apparaissent, accompagnés de leur maman aux traits tirés mais souriants. L´homme qui attendait, le regard fixé sur les portes est le papa de cette famille. En une fraction de seconde, il reconnaît sa fille et l´appelle par son prénom. Elle se retourne et le voit dans la foule. Elle court, glisse sous la barrière et saute dans ses bras. Les 2 autres petits suivent ainsi que la maman. Il prend la main de son épouse, la regarde dans les yeux et pose un baiser sur son front. Une famille réunie.

Oui mais voilà... la police guette. Une paire de casquettes bleues suivait discrètement la maman depuis le passage des passeports. L´un fait le tour des barrières de la zone d´arrivée et se positionne derrière le père de famille (juste au cas où il s´échapperait en courant). L´autre, une femme brune aux cheveux courts coiffés à la garçonne, se dirige vers le papa en lui faisant face.

« Vous êtes le père ? » lui dit-elle d´un ton glacé mais suffisamment marqué pour que tout le monde entende.  

« On peut voir vos papiers ? »

L´homme pose son enfant par terre et cherche son portefeuille dans son blouson, d´où il sort une carte de résident soigneusement rangée. Il la tend à la dame en uniforme, qui se met à la scruter minutieusement, des deux côtés, puis prend un instant pour réfléchir avant de la rendre. Elle sort son téléphone portable de sa poche de pantalon, puis improvise une photographie des deux faces de la carte de résident.

« j´ai pris une copie de votre carte de résident.  Maintenant on a votre adresse. Si la dame n´est pas partie dans une semaine avec les enfants, vous allez avoir de gros problèmes. Parce qu´elle a un visa de tourisme. Ça peut aller chercher dans les dix ans de prison. Vous avez compris ??? »

Elle rend la carte au papa, qui sourit et acquiesce nerveusement pour garder un minimum de dignité devant  son épouse et ses enfants, qui heureusement ce soir ne parlent pas encore le français.

Les sinistres casquettes s´en vont continuer leur ronde. L´interrogatrice satisfaite marmonne à son collègue: « En visite ? Tu parles... ».

La famille s´éloigne, main dans la main. Scène de vie quotidienne dans un aéroport français.

« Papa c´est quoi un policier ? » m´a demandé un jour mon fils.

En vérité mon fils, un policier est un gardien de la paix des uns et un instrument de la peur des autres.  


05/08/2009
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